Les défis du fonctionnaire territorial face à la crise

Cet article a été écrit par Régis Desbonne, élève ingénieur en chef, promotion Rachel-Carson (2020-2021) et Guillaume Lanfranchi, élève ingénieur en chef, promotion Rachel-Carson (2020-2021) et Président d’IngéChef en partenariat avec la Gazette et publié sur son site.

Les élèves ingénieurs en chef de l’Institut national des études territoriales (INET) prennent la parole dans « La Gazette » ou sur « lagazette.fr ». Chaque mois, ces futurs cadres dirigeants des collectivités publieront une tribune, fruit de leur travail commun sur les grands défis auxquels nous devons faire face. Ils inviteront ponctuellement leurs collègues élèves administrateurs et élèves conservateurs de bibliothèques à la réflexion.

Les générations de fonctionnaires qui arrivent aux responsabilités dans les collectivités ont baigné dans les crises. Bien sûr, l’intensité de la crise économique et ses implications sur le taux de chômage ont connu des variations depuis les années 80 mais, au fil des années, s’est imposée, à tort ou à raison, la perception d’un déclin continu. A cela s’ajoute la crise écologique, majeure, criante, dont les ressorts sont connus depuis cinquante ans et souvent ignorés. La crise sociale ne pourra, quant à elle, être affrontée que par des modes de protection massifs et résilients. Nous sommes face à un désordre systémique dont nous ne connaissons pas les conséquences à moyen terme ni l’ampleur des chocs à venir.

Ce que nous savons cependant, c’est que la réponse passe par la nécessité d’inscrire l’innovation au cœur de l’action publique. En priorité, les écoles formant les fonctionnaires doivent pousser à l’ouverture, à la capacité d’imagination. La crise sanitaire, puisque le mot « crise » emporte tout sur son passage, a bien mis en évidence le besoin constant d’adaptabilité et d’agilité des services pour faire face aux besoins urgents de la population. C’est la force de la complémentarité et de la différence qui a permis de trouver des solutions. A l’image de la spécialisation des espèces, en cas de crise, seules les plus adaptées survivent.

Formation, transmission du savoir, bonnes pratiques

Ce dont nous pouvons être sûrs, c’est que la formation, la transmission du savoir et des bonnes pratiques seront les réponses pour demain. L’essor des filières administratives, culturelles et techniques qui s’entremêlent et s’enrichissent mutuellement favorise l’éclosion de solutions. Loin du profil type du haut fonctionnaire uniforme ou uniformisé, les talents variés et les profils polychromatiques doivent être renforcés. La valorisation des formations continues tout au long de la vie est à pérenniser.

Bien évidemment, cela nécessite de conserver des moyens importants pour les organismes de formation plutôt qu’un délitement progressif de l’apprentissage. La compréhension de la notion de service public et du sens de l’action publique ne s’acquièrent pas de manière innée. Il faut du temps, de l’expérience et de l’accompagnement. Ce sur quoi nous devons travailler aujourd’hui, c’est la capacité à se réinventer. La transition écologique doit devenir le cœur de l’action publique, alimentant tous les organes des services publics. Ainsi, l’adaptation au changement climatique doit s’intégrer dans les décisions quotidiennes et stratégiques. Pour chaque politique menée, la question de l’impact des sommes investies sur les émissions de CO2 équivalent doit être centrale. Le budget d’une collectivité ne pourra plus être lu sans ses incidences directes sur la transition écologique.

Plutôt que les discours dépressifs, nous nous devons d’insuffler l’espoir pour porter les transformations nécessaires. Les jeunes débutant dans la fonction publique, mais également les nouveaux cadres dirigeants, sont conscients des difficultés et des défis à relever ; ils savent qu’ils sont capables d’apporter des réponses pertinentes et sont prêts à s’y atteler.

https://www.lagazettedescommunes.com/704780/les-defis-du-fonctionnaire-territorial-face-a-la-crise/

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La haute fonction publique plaide pour plus de souplesse et d’écoute par les politiques

Article paru sur la Gazette écrit par Claire Boulland

Alors que devait être présentée la réforme de la haute fonction publique, la crise sanitaire a révélé d’autres priorités que celles énoncées dans le rapport “Thiriez”. Des territoriaux en dressent la liste.

LES TERRITORIAUX IMAGINENT LE MONDE D’APRÈS. Urbanisme, changement climatique, finances, fonction publique, management, mobilité, numérique… A quoi doit ressembler le monde post-Covid-19 dans les territoires ? « La Gazette » donne la parole à ses lecteurs en recueillant leur expertise pour mieux construire l’avenir.
Refonder le recrutement, la formation et la gestion des carrières dans la haute fonction publique, pour qu’elle « ressemble à la société », ambitionnait le Président en avril 2019. C’était l’objet de la réforme qui aurait dû être présentée ce printemps. Une crise sanitaire et un remaniement plus tard, le plan est entre les mains de la ministre de la Transformation et de la fonction publiques, Amélie de Montchalin. Et elle le veut en vigueur d’ici à 2022. Il dira si cette période trouble a fait émerger un nouveau diagnostic et rebattu les cartes. Nombre d’acteurs l’espèrent. Car, si la grande majorité des recommandations de la mission de Frédéric Thiriez, qui a remis ses propositions en février, faisait consensus sur la promotion de la parité, les classes préparatoires et la recherche d’une meilleure diversité des profils, d’autres ont interloqué.

Des aberrations dénoncées

C’est le cas de la création d’un tronc commun d’enseignements à sept écoles de la haute fonction publique, dont l’Institut national des études territoriales (Inet), pour « créer une culture partagée ». « Aberration » dénoncée par le président du CNFPT : ce tronc commun ne concernerait que les administrateurs territoriaux … lire la suite sur le site de la Gazette

Le Président d’IngéChef a contribué à cet article : “

Des formations libérant la créativité
« Notre génération de dirigeants ingénieurs en chef [la création de la filière date de 2016 et les premiers concours ont été organisés en 2017, ndlr] est sortie bouleversée de cette crise. Les notions d’efficacité et de résultats au bénéfice des usagers et citoyens ont été remises au centre des préoccupations. Cela augure de nouvelles façons de faire, et démontre que le changement est possible. Et que cela ne passe pas nécessairement par le statut. La représentation de la filière technique au plus haut niveau vient déjà diversifier les profils des A+. On pourrait, en revanche, penser des formations nous apprenant à libérer notre imagination, et notre créativité au quotidien, dans l’exercice de nos fonctions. C’est ce qui fera la différence pour créer des services plus agiles et efficaces rapidement. Notre association s’attache principalement à faire émerger toutes les synergies utiles dans la sphère publique et territoriale. Il s’agit pour nous, aujourd’hui, de mobiliser l’ingénierie du territoire à l’instar de ce que propose l’écosystème de la recherche. »

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Crise sanitaire et biodiversité et s’il était enfin temps d’agir

Paru sur le site de notre partenaire Weka, il s’agit du dernier article de la série d’analyses consacrée à la réflexion prospective post-crise du Covid-19 par la troisième promotion des élèves ingénieurs en chef territoriaux, futurs cadres dirigeants des collectivités locales. Les 23 élèves ingénieurs en chef territoriaux de la promotion 2020-2021, actuellement à l’INET, ont choisi le nom de Rachel Carson, figure emblématique de la protection de l’environnement, pour représenter leurs valeurs.

La crise sanitaire, au-delà de tout pessimisme, doit constituer avant tout une opportunité de donner un nouvel élan pour des politiques publiques en faveur de la préservation de notre environnement et ainsi éveiller les consciences des citoyens.

Un constat alarmant

La crise sanitaire que nous traversons, et la crise économique et sociale qui suivent, sont les conséquences d’une crise écologique plus globale que nous connaissons depuis plusieurs années. L’effondrement de la biodiversité face à l’action de l’Homme (déforestation, artificialisation des sols, surconsommation des ressources, pollution, etc) est une bien triste réalité aux méfaits multiples. Les oiseaux communs en France ont par exemple décliné de 30 % depuis les années 90 et les insectes de 80 %.

Au-delà de ce constat, cette crise révèle avant tout notre vulnérabilité et démontre que notre santé est directement liée au maintien et bon fonctionnement des écosystèmes. Une vulnérabilité qui s’accroit à chaque nouveau phénomène, et qui vient amplifier la fragilité de notre planète, alors que certains effets sont d’ores et déjà irréversibles.https://2bb856922427b608e90dcd321a3ef731.safeframe.googlesyndication.com/safeframe/1-0-37/html/container.html

Et si le Covid-19 n’était qu’un bref aperçu de l’avenir qui nous attend ? Comme le dit Edgar Morin, sociologue et philosophe « La grande crise planétaire que nous vivons annonce soit la grande régression, soit la possible métamorphose ». En effet, avec ambition et optimisme, il est possible de croire en une transformation de nos sociétés, signe d’espoir, pour la construction d’un monde meilleur.

L’éveil des consciences pour une possible métamorphose

La métamorphose est un principe alliant rupture et continuité en agissant autrement. Un changement de paradigme pour la transformation des politiques publiques : écologiquement viables, économiquement durables, socialement solidaires et construites collectivement en mobilisant chaque citoyen.

La clé de compréhension repose sur une approche systémique, comprendre que tout est interdépendant, que chaque action peut avoir des effets multiples et parfois amplificateurs. Il est nécessaire alors d’être responsable en interrogeant nos modes de vie et en pensant à l’héritage que nous allons transmettre aux générations futures.

Alors que depuis plus de 50 ans (le premier sommet sur l’environnement date déjà de 1972), de nombreuses personnalités comme Rachel Carson (choix du nom de promotion des élèves ingénieurs en chef), ont cherché à éveiller les consciences, il est désormais temps de saisir cette opportunité pour collectivement faire différemment et conduire la transition écologique dès maintenant.

Mais concrètement comment agir ?

A l’aube d’un nouvel acte de décentralisation, les collectivités locales doivent agir avec pragmatisme en faveur de la résilience de nos territoires. Suite aux élections municipales de juin dernier, le renouvellement de certains exécutifs constitue une opportunité pour répondre localement aux enjeux environnementaux, tout en agissant en cohérence avec les enjeux sociaux, économiques et démocratiques.

La préservation de la biodiversité doit avant tout être traduite avec des objectifs ciblés et contraignants au sein des documents réglementaires de planification urbaine comme les plans locaux d’urbanisme. Il s’agit alors de lutter contre l’étalement urbain et d’intégrer l’objectif à terme d’une zéro artificialisation nette.

L’autre levier à activer est la réduction des consommations énergétiques et en conséquence de nos émissions de gaz à effet de serre, responsables du réchauffement climatique. La rénovation énergétique des logements (responsable de 2/3 des émissions de gaz à effet de serre) constitue l’un des leviers, tout comme la mobilité et la végétalisation des villes.

Une végétalisation, qui passe nécessairement par la plantation d’arbres, la mise en  place d’une canopée pour constituer des îlots de fraicheur, stocker le carbone et être un support indéniable de biodiversité. Toutefois, au-delà des objectifs quantitatifs du nombre d’arbres plantés, il est avant tout primordial de privilégier la qualité et diversité des plantations en assurant durablement le développement des végétaux dans un milieu urbain bien souvent hostile.

Des plantations de qualité signifient également de prendre en considération les sols où se nourrissent les végétaux. Cela passe par de multiples actions : infiltration des eaux pluviales, préservation de la vie biologique des sols, maintien de connexions (trame), etc.

Pour autant, l’Homme ne peut pas maitriser et occuper tous les espaces végétalisés. Nos modes de gestion doivent être interrogés afin de laisser davantage d’espaces sans aucunes interventions et usages. En quelques mois, et nous l’avons constaté pendant la période du confinement, c’est un foisonnement d’espèces végétales et animales qui s’installeront.

Enfin, il est important de sensibiliser et former le plus grand nombre sur les enjeux environnementaux. Cette prise de conscience doit concerner les acteurs d’aujourd’hui en faveur de l’agilité, mais également les cadres dirigeants de demain, futurs managers des transitions. À cet effet, les grandes écoles, comme Sciences Po, engagent le grand tournant des transformations avec des approches environnementales et sociétales au sein des programmes de formation.

Programmer et réglementer, agir selon le principe de précaution et enfin former et sensibiliser sont les clés d’une meilleure protection de la biodiversité pour les collectivités locales.

par Frédéric Despinasse, Mathilde Tempez, Folco Laverdière
Élèves ingénieurs en chef – Promotion Rachel Carson

https://www.weka.fr/actualite/developpement-durable/article/crise-sanitaire-et-biodiversite-et-s-il-etait-enfin-temps-d-agir-107372/

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Nos territoires en action pour une alimentation durable et saine 

Dans le cadre de notre partenariat avec Weka, cet article s’inscrit dans une série de contributions de la troisième promotion des élèves ingénieurs en chef territoriaux, futurs cadres dirigeants des collectivités locales, consacrée à la réflexion prospective post-crise du Covid-19.

La période « Post Covid-19  » démarrant petit à petit, l’expression des souhaits de cet après-crise vient interroger nos habitudes. Après la mobilité, place à l’alimentation et à l’agriculture.

Consommer local et promouvoir les circuits courts, participer à une démarche Zéro déchet, soutenir la pratique d’une agriculture raisonnée sont autant d’actions qui se développent au sein de nos territoires.

Toutes ont un point commun : interroger notre mode de consommation et d’alimentation. À l’heure où ces notions sont mises en lumière par le contexte actuel, champ libre est laissé aux collectivités de se positionner comme catalyseur d’actions individuelles et collectives déjà existantes afin de les transformer en une énergie capable de « bouger les lignes ».

Les avantages de ces démarches sont multiples. Elles permettent de créer une chaîne de valeur profitable à chacun des acteurs : le producteur, avec une sécurisation de son modèle économique et une reconnaissance du métier, le consommateur, via l’achat d’un produit local de qualité au « juste prix », et le territoire, avec la création d’emplois locaux et de lien social.

Parsemées à travers les territoires, des démarches plus ou moins formelles existent déjà. Nombreuses sont les AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) qui permettent d’amener un peu de campagne en ville, de séjours à la ferme qui aident à découvrir ce quotidien si particulier ou de fermes urbaines qui réussissent le défi d’associer « campagne et ville » au sein d’un même îlot.

La mise sur le papier et la contractualisation d’engagements ambitieux permettraient de concrétiser et de stimuler ces actions éparses.

Porter des projets alimentaires territoriaux forts pourrait constituer une démarche clé des collectivités dans la quête de la résilience et du développement durable des territoires.

Ces projets collectifs ont pour ambition de rapprocher les producteurs, les transformateurs, les distributeurs et les consommateurs pour développer l’agriculture durable sur les territoires et la qualité de l’alimentation au bénéfice de tous.

Car chacun doit pouvoir bénéficier d’une offre d’alimentation durable dont l’agilité, la durabilité et la qualité ne sont pas à démontrer.

Ces évolutions s’imposent de plus en plus comme nécessaires. Dans un contexte où les banques alimentaires, les CCAS et autres institutions solidaires regorgent de demandes, un lien fort entre production locale disponible et besoin des populations aurait tout son sens.

La crise vécue a été révélatrice d’une tension entre un système agro-alimentaire complexe, intégré aux marchés mondiaux, et un modèle local cherchant à reconnecter consommateurs et producteurs, porté sur l’indépendance et l’autosuffisance, mais nécessitant une profonde refonte du système agro-alimentaire.

C’est donc l’ensemble de l’écosystème qui doit se mettre en marche afin d’aboutir à une transformation globale. Ce changement radical et complexe permettra de reprendre le contrôle sur notre alimentation pour lui donner plus de sens et de valeur.

Producteurs, distributeurs, consommateurs, territoires : tous ont un rôle à jouer.

Les collectivités disposent de pistes concrètes et prometteuses : les restaurants scolaires sont ainsi une formidable vitrine pour les produits locaux et contribuent à construire un modèle responsable tout en sensibilisant les plus jeunes afin qu’ils puissent renouer avec ce rapport à la terre et au temps des saisons.

À travers l’orientation donnée aux plans locaux d’urbanisme, la mise à disposition ou la réservation de terres pour l’installation de productions locales, les différents usages de l’espace doivent être réfléchis, pilotés et coordonnés afin d’aboutir à un équilibre entre attractivité du territoire, économie, aménagement et préservation des ressources.

À l’heure du « mode projet », de la transversalité, de l’agilité et de la participation citoyenne, le sujet de l’alimentation constitue un formidable exercice pour les collectivités locales !

Plus qu’une simple question d’approvisionnement, la problématique de l’alimentation réinterroge aussi le lien et la solidarité entre un milieu urbain qui regorge de consommacteurs, mais ne produit peu ou pas, et un milieu rural isolé foisonnant de ressources et de savoir-faire.

Recréer ce lien si important entre le rural et l’urbain et entamer un dialogue citoyen perdu entre « ceux de la ville » et « ceux des champs » est indispensable.

Véritable engrenage d’un système complexe, donnons à l’agriculture et à l’alimentation toute la place qu’elles méritent dans notre quête d’un mode de vie plus raisonné, plus durable et plus juste.

« De l’ambition, de l’imagination, des mains et des outils : l’intérêt général ne se décrète pas, il se conçoit, se construit et s’incarne, pas à pas. » (Extrait du site internet de l’Agence Vraiment Vraiment)

À nos idées, projets, échanges pour relever ce défi collectif de l’alimentation durable !

Mathilde Tempez, Frédéric Despinasse, Folco Laverdière
Élèves ingénieurs en chef pour l’Association des Ingénieurs en chef territoriaux (IngéChef)

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De la “démobilité” subie à la mobilité frugale et heureuse

Après s’être projetés sur le monde souhaitable de l’après Covid-19, approfondissons une première question : quelles seront les répercussions à court et moyen terme de la pandémie sur la manière dont nous nous déplacerons ? C’est une question que se posent sans nul doute les collectivités qui organisent la mobilité sur leur territoire et disposent de compétences multiples capables d’influer sur les pratiques de déplacement.

Après cette période de « démobilité » vécue, mais qui a pu être aussi bien subie que désirée, plusieurs évolutions possibles peuvent changer la donne en matière de mobilité. Un retour à la case départ avec la domination du « tout voiture » (part modale de plus de 70 % pour les trajets domicile-travail) n’est pas souhaitable au plan environnemental, mais aussi économique si on considère les effets de la congestion. Il est néanmoins tout à fait probable, d’autant plus que les effets anxiogènes de la crise couplés à une dégradation du niveau de service des transports collectifs, a pu amener de nouveaux adeptes vers la voiture confortés, par le retour de la communication du secteur automobile. Nous pouvons aussi imaginer que de nouvelles pratiques transitoires en temps de crise, comme le vélo (oublié en début de confinement comme moyen de déplacement du quotidien, puis rétabli par le Conseil d’État avant de devenir l’étendard national du déconfinement), se pérennisent, voire s’amplifient.

En matière d’achat, plusieurs options se présentent : nouvelle accélération du e-commerce, renouveau des commerces de proximité apparus bien utiles et parfois plus agiles, ou encore leur combinaison. D’autres transitions déjà amorcées, comme le télétravail ou la télémédecine, pourraient s’accélérer après une découverte pour certains, une confirmation et une invitation à poursuivre le mouvement pour d’autres.

Le confinement a pu également générer des frustrations qui ont éveillé de nouveaux désirs pour la vie d’après, notamment en matière d’habitat individuel et de qualité de vie en mode confiné. Enfin, cette période inédite a pu inviter de nombreuses personnes à l’introspection sur le monde, les limites de notre modèle de développement et la recherche d’autres modes de vie, moins frénétiques et plus en phase avec notre environnement.

Pour les collectivités territoriales, plusieurs enjeux apparaissent clairement. En premier lieu, la capacité de poursuivre leurs efforts pour favoriser une mobilité durable, à l’heure où les recettes commerciales des transports collectifs ont chuté brutalement, et la fiscalité dédiée à travers le versement mobilité risque de souffrir durablement selon l’ampleur des conséquences économiques à venir. L’attractivité résidentielle et la maîtrise de l’étalement urbain, avec un décalage entre les orientations d’aménagement et les attentes fortes héritées du traumatisme du confinement, sont aussi en jeu. L’attractivité touristique, l’aménagement des zones économiques et commerciales sont aussi requestionnés comme la redynamisation des centres villes déjà au cœur des préoccupations.

Que pourraient, alors, faire les collectivités territoriales pour limiter les effets négatifs d’un retour à la « normale » et saisir les opportunités de changement ?

Certaines collectivités ont tenté de profiter de l’espace-temps disponible pour engager des initiatives d’accélération des mobilités actives à travers les « coronapistes », la période de rupture des habitudes étant toujours un moment clé pour engager le changement. Mais plus globalement, et pour ne pas subir, il semble nécessaire de trouver un meilleur équilibre entre les modes selon les zones territoriales et les distances à parcourir et d’accompagner de nouvelles pratiques de démobilité, qui seraient désirables et qui pourraient être facilitées avec l’appui des collectivités. Accompagner le tissu économique et les administrations à organiser les bonnes conditions de télétravail massif, développer des « hubs » multiservices bien répartis pouvant constituer de nouvelles polarités pour les activités et l’habitat en zone urbaine et périurbaine ou avec des formes adaptées à l’espace rural.

Les collectivités peuvent aussi aménager l’espace en trouvant le bon équilibre entre la densification nécessaire et la demande de qualité de vie, de nature en ville, de lieux aussi agréables pour la rencontre que pour « cultiver son jardin » familial, ou encore animer un réseau local de proximité autour de commerces, d’équipements et de services. Engagé par certaines collectivités, le maillage du territoire en véloroutes à haut niveau de service, décentralisé et associé à des aménagements d’apaisement des centres-bourgs pourrait enfin participer à la nouvelle attractivité de ces derniers en les connectant aux métropoles par des liaisons douces.

En somme, les collectivités ont de nombreuses cartes en main, pour ne pas subir les conséquences de la crise et construire un lendemain meilleur !

Folco Laverdiere, Mathilde Tempez et Frédéric Despinasse,
Élèves ingénieurs en chef pour l’Association des ingénieurs en chef territoriaux (IngéChef)

Article écrit dans le cadre de notre partenariat avec Weka qui en a assuré la diffusion sur son site internet

https://www.weka.fr/actualite/urbanisme/article/de-la-demobilite-subie-a-une-mobilite-frugale-et-heureuse-104869/

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